RT 5 – Pollutions maritime, fluviale et littorale

Mai 2021

Rédacteurs :
Nicolas Tamic, responsable Opérations – adjoint au directeur – Le Cedre
Anne Le Roux, coordinatrice de l’intervention – Le Cedre

 

Sommaire :

  1. Définitions
  2. Nature, causes et effets
  3. Cadre réglementaire
  4. Mesures de prévention et de lutte spécifiques

1  Définitions

Les pollutions accidentelles sont des déversements en plus ou moins grande quantité de produits pétroliers ou de substances dangereuses dans l’environnement suite à un évènement de type incident/accident.

Le terme pollution recouvre de nombreux domaines, si bien qu’il est difficile de le définir précisément. En 1965, le conseil scientifique de la Maison-Blanche définit la pollution comme étant « une modification défavorable du milieu naturel qui apparaît, en totalité ou en partie, comme un sous-produit de l’action humaine, au travers des effets directs ou indirects altérant les critères de répartition des flux de l’énergie, des niveaux de radiation, de la constitution physico-chimique du milieu naturel et de l’abondance des espèces vivantes. Ces modifications peuvent affecter l’homme directement ou au travers des ressources agricoles, en eau et en produits biologiques. Elles peuvent aussi affecter en altérant les objets physiques qu’il possède ou les possibilités récréatives du milieu. »

Une autre définition se rapportant plus précisément au milieu marin est le fruit des réflexions du Joint Group of Experts on the Scientific Aspects of Marine Environmental Protection (GESAMP) en 1982. Cet organe scientifique qui conseille Nations-Unies sur la protection de l’environnement marin précise que la pollution est « l’introduction, directe ou indirecte, par l’homme, de substances ou d’énergie dans le milieu marin (y compris les estuaires) lorsqu’elle a des effets nuisibles tels que dommage aux ressources biologiques, risque pour la santé de l’homme, entrave aux activités maritimes, y compris la pêche, l’altération de la qualité d’eau de mer du point de vue de son utilisation et dégradation de valeurs d’agrément».

Ces deux définitions ont pour dénominateur commun un acte générateur lié directement ou indirectement aux activités humaines. La pollution potentielle qui en découle peut alors être soit chronique, soit accidentelle.

2  Nature, causes et effets

On parle de pollution chronique quand celle-ci altère l’écosystème par des émissions répétées ou  permanentes de polluants. La pollution chronique concerne également les polluants rémanents, c’est-à-dire ceux qui perdurent dans le temps alors même que leur cause a disparu. Elle peut être variable en fonction des saisonnalités par exemple. Une pollution chronique majeure est celle des macrodéchets et des microplastiques dans l’environnement marin, la frange littorale et les eaux intérieures.

La pollution accidentelle trouve son origine dans un événement imprévu et non maîtrisé, indépendant de la volonté de l’homme. Ses conséquences peuvent être en partie jugulées dès lors que des mesures de lutte sont mises en œuvre par leurs auteurs ou les autorités en charge de cette lutte. Il peut aussi s’agir de pollutions volontaires, notamment quand le pollueur rejette dans l’eau des substances au-delà des seuils fixés par les règlements. C’est notamment le cas pour les rejets anormaux des eaux usées en mer ou des rejets des ordures par les navires. Ces rejets sont encadrés par les annexes IV et V de la convention MARPOL. Le dépassement volontaire de ces seuils peut conduire à des situations nécessitant des réponses identiques aux pollutions accidentelles.

Cette fiche traitera essentiellement des pollutions accidentelles maritimes, littorales et fluviales. Elle abordera cependant la pollution chronique littorale sous l’angle du traitement des macrodéchets.

Les pollutions maritimes accidentelles trouvent leurs sources dans les déversements d’hydrocarbures et de produits chimiques dans le milieu. Elles peuvent avoir plusieurs causes telles que les naufrages, les échouements, les collisions et abordages, les ruptures d’installations techniques à bord des navires et les pertes de conteneurs transportant des matières dangereuses (réparties en neuf catégories : inflammables, gaz dangereux, liquides inflammables, solides inflammables, matières comburantes, matières toxiques infectieuses, matières radioactives, matières corrosives et matières diverses).

Elles peuvent aussi concerner des rejets par les navires d’eau de ballast susceptibles d’entraîner le déséquilibre du biotope par l’introduction et à la propagation d’espèces aquatiques envahissantes dans un milieu qui n’est pas celui de leur origine. Il peut aussi arriver que des rejets d’eaux usées, de déchets et d’ordures soit à l’origine de ces pollutions. Enfin, ce type de pollution peut provenir d’une activité terrestre laissant se déverser des polluants dans le milieu. C’est le cas des incidents techniques dans les stations d’épuration qui peuvent générer des rejets d’eaux usées et de produits chimiques en mer, sur la frange littorale.

Les pollutions liées aux eaux de ballast ne peuvent pas être combattues par la mise en place de moyens de lutte tactiques. Par conséquent, elles ne seront  pas abordées dans cette fiche.

Les pollutions littorales accidentelles trouvent leurs causes dans les mêmes origines que celles développées supra. Elles sont bien souvent le prolongement des pollutions maritimes, à l’exception de celles d’origine tellurique.

Les pollutions fluviales accidentelles peuvent résulter des phénomènes de marées accompagnant les pollutions ci-dessus. Dans pareils cas, ce sont les eaux saumâtres et leurs berges qui seront touchées par la pollution. Mais les fleuves et rivières peuvent également être sujets à des pollutions trouvant leur origine dans l’exploitation agricole et industrielle des milieux qui les entourent ou à l’occasion d’accidents routiers entraînant des déversements dans des réseaux hydrauliques  conduisant au final à une pollution du cours d’eau.

Les pollutions chroniques par macrodéchets concernent essentiellement les rejets en mer et dans les fleuves de matières plastiques multiformes. Les plastiques à usage unique (coton-tiges, bouchons, mégots de cigarettes) représentent la majorité de celles-ci et peuvent provenir des réseaux d’eaux pluviales dans lesquels se déversent ces matières dès lors qu’elles ne sont pas sujettes à une opération de tri des déchets. Ceci d’autant plus que les filtres des stations d’épuration ne permettent pas de retenir ces matières. En mer, ces déchets peuvent aussi avoir pour origine les déchets provenant des activités de pêches et d’aquaculture. Enfin, près de 40% de ces déchets sont d’origine inconnue.

Les effets d’une pollution par hydrocarbure sont multiples.

Ceux-ci varieront sur l’environnement en fonction de la composition de l’hydrocarbure. En fonction de cette dernière, la contamination de l’eau sera plus ou moins importante. Alors que les essences et les kérosènes tendront à s’évaporer en surface, les raffinés légers auront tendance à se disperser (fractionnement du pétrole en gouttelettes) dans la colonne d’eau. Enfin, les raffinés lourds  auront une dispersion difficile dans la colonne d’eau. Plus persistants dans l’environnement, ils auront des effets par engluement de la flore et de la faune sauvage.

Un phénomène de dissolution (diffusion des constituants solubles du pétrole dans la masse d’eau) et d’assimilation par les organismes vivants pourra aussi apparaître, notamment pour ce qui concerne les hydrocarbures aromatiques.

Les pétroles bruts, en fonction de leur composition et des conditions météo-océaniques au moment du déversement, pourront présenter plusieurs de ces comportements de façon plus ou moins marquée.

Les effets d’une pollution par produit chimique dépendent du type de substance impliquée et de son comportement dans l’environnement. Celui-ci sera différent en fonction de la nature du produit (gaz, liquide, solide). Déversé dans l’eau, le comportement d’une substance chimique influence fortement son devenir. Dans la plupart des cas, une substance n’a pas un mais plusieurs comportements. Une classification, appelée  Standard European Behaviour Classification (SEBC)  permet de déterminer ce comportement.

Les produits gazeux (G) et évaporants (E) vont se disperser dans l’atmosphère. Les produits flottants (F) vont s’étaler en surface et former une nappe. Puis, sous l’action des vagues et des courants, ils vont former des aérosols ou bien se fragmenter en plaques de plus en plus petites et/ou former une émulsion avec l’eau de mer (émulsification), ou encore parfois se disperser naturellement. Ils peuvent aussi subir une oxydation sous l’effet des rayonnements solaires (photolyse). Les produits solubles (D) vont se diluer dans la colonne d’eau, ce qui entraînera une diminution de leur concentration et donc de leurs effets. Ils peuvent ensuite être dégradés par la lumière du soleil (photolyse) ou bien par des micro-organismes (biodégradation). Il arrive aussi qu’ils se fixent sur des particules organiques ou minérales en suspension (adsorption) ou bien qu’ils s’accumulent progressivement dans les organismes vivants (bioaccumulation). Les produits coulants (S) vont, dans un premier temps, se déposer sur le fond. Ils peuvent par la suite être enfouis par des mouvements sédimentaires ou bien repasser dans la colonne d’eau (dissolution).

Les effets néfastes des produits chimiques sur l’environnement sont regroupés sous le terme d’écotoxicité. Celle-ci peut-être directe ou indirecte.

L’écotoxicité directe peut se traduire par :

  • des effets létaux, c’est-à-dire une mortalité des individus due à l’interruption d’une ou plusieurs de leurs fonctions vitales ;
  • des effets sublétaux qui se traduisent par une diminution de certaines capacités des individus (reproduction, respiration, alimentation). Ces effets compromettent alors sérieusement le maintien de la population. C’est typiquement le cas des pollutions marines au tributylétain qui entraînent une masculinisation des bigorneaux ;
  • des effets secondaires comme par exemple l’altération des propriétés organoleptiques de la chair des animaux ou des tissus végétaux utilisés pour la consommation humaine. À titre d’exemple, une concentration de 5 mg de styrène par kilogramme de chair de crabe peut être détectée olfactivement.

Les produits chimiques ont également des effets indirects sur l’environnement qui se traduisent à l’échelle des populations et non plus seulement des individus. La structure et la productivité des écosystèmes peuvent ainsi être perturbées. Cela peut par exemple aboutir à une modification des espèces dominantes ou à une diminution, voire une perte, de la biodiversité. Les produits chimiques impactent également tous les maillons de la chaîne alimentaire, du plus petit (plancton) au plus gros (baleine).

3  Cadre réglementaire

La réglementation entourant les pollutions accidentelles est encadrée par un corpus international et national. Certaines dispositions internationales, notamment les règlements européens, sont directement applicables en droit français. D’autres, telles les directives européennes, font l’objet d’une transposition opérée par l’Etat dans son dispositif de droit interne.

 

3.1  La réglementation internationale

3.1.1. Les conventions internationales de portée générale

Ce texte fixe les règles de libre communication et circulation entre les pays, d’utilisation pacifique des mers, d’exploitation équitable et efficace des ressources et de préservation du milieu marin. Elle délimite les différentes zones maritimes bordant les États côtiers, les îles et les États archipels. Elle est interdépendante avec la convention MARPOL de l’organisation maritime internationale

Cette convention internationale est le socle de la réglementation internationale visant à prévenir et à lutter contre les pollutions en mer. Elle encadre au travers de ses annexes  les modalités de navigation applicables aux navires et vise à prévenir les pollutions liées aux hydrocarbures, aux substances nocives,  aux eaux usées, aux ordures et  aux rejets atmosphériques.

Elle a pour but de faciliter la coopération internationale et l’assistance mutuelle en matière de préparation et de lutte en cas d’incidents majeurs de pollution par les hydrocarbures et exige des États qu’ils se préparent en élaborant des systèmes nationaux d’intervention d’urgence en cas de pollution et en maintenant une capacité et des ressources adéquates pour faire face aux urgences en matière de pollution par les hydrocarbures.

3.1.2. Les conventions internationales liées aux indemnisations consécutives aux pollutions.

  • CLC 69/92 (convention sur la responsabilité civile):

Ce dispositif engage la responsabilité du propriétaire du navire-citerne à l’origine de la pollution accidentelle, que cette pollution provienne de sa soute ou de sa cargaison. Sa responsabilité est objective (sans faute à prouver). En contrepartie, il existe un plafond maximum d’indemnisation de 90 millions de droit de tirage spécial (DTS) (environ 107 millions d’€) au-delà duquel la responsabilité de l’armateur ne pourra pas être engagée. Si les dommages sont supérieurs à ce plafond, les FIPOL peuvent compléter l’indemnisation.

Ce système vient en complément de la CLC 69/92. Le montant de l’indemnisation peut aller jusqu’à 203 millions de DTS (242 millions d’€). Seuls les 118 Etats membres (dont la France) à la convention peuvent obtenir ce complément d’indemnisation.

Ce dispositif vient renforcer le montant de l’indemnisation jusqu’à 750 millions de DTS (900 millions d’€ environ). Seuls les 32 Etat membres (dont la France) de ce fonds complémentaires peuvent prétendre à l’indemnisation.

Cette convention couvre l’indemnisation de tous les navires autres que les navires-citernes et concerne le fuel de soute déversés accidentellement. Elle est limitée à 70 millions de DTS (83 millions d’€).

La Convention internationale de 1996 sur la responsabilité et l’indemnisation pour les dommages liés au transport par mer de substances nocives et potentiellement dangereuses (Convention SNPD) a pour objet de garantir une indemnisation convenable, prompte et efficace pour les dommages aux personnes et aux biens, le coût des opérations de nettoyage, les mesures de remise en état et les pertes économiques liés au transport par mer de substances nocives et potentiellement dangereuses. Le Protocole SNPD de 2010 entrera en vigueur 18 mois après la date à laquelle il aura été ratifié par au moins 12 États, dont quatre États ayant chacun au moins 2 millions d’unités de jauge brute. En outre, la quantité totale de cargaisons donnant lieu à contribution au compte général reçue au cours de l’année civile précédente doit atteindre au moins 40 millions de tonnes.

 

3.2  La réglementation nationale

Ce sont principalement les dispositions du code de l’environnement et un ensemble d’instructions du premier ministre qui organisent le dispositif français. Elles sont complétées de normes issues du code des transports. Certaines dispositions sont de nature répressive, d’autres ont trait à la prévention et à la lutte contre les pollutions accidentelles.

3.2.1. Les dispositions répressives

Le délit de pollution marine accidentelle est prévu par l’article L.218-19 du code de l’environnement qui sanctionne deux situations. D’une part, le fait de provoquer un rejet de substance polluante par négligence, imprudence ou inobservation des lois et règlements, d’autre part, le fait de provoquer un accident en mer par imprudence, négligence ou inobservations des lois et règlements quand cet accident provoque une pollution des eaux, ou de ne pas prendre les mesures pour l’éviter, lorsque cet accident a entraîné une pollution des eaux. Cette responsabilité pénale est portée par le capitaine ou le responsable de la conduite ou de l’exploitation du navire ou par toute autre personne exerçant un pouvoir de contrôle ou de direction dans la gestion ou la marche du navire. En complément, le 4ème alinéa de l’article L. 218-19 prévoit que les personnes physiques qui n’ont pas causé directement le dommage, mais qui ont créé la situation qui a permis la réalisation du dommage ou qui n’ont pas pris les mesures pour l’éviter sont responsables s’il est établi qu’il y a eu une violation délibérée d’une obligation particulière de sécurité ou de prudence ou s’il existe une faute caractérisée qui qui exposait l’environnement à un risque d’une particulière gravité qu’elles ne pouvaient pas ignorer.

Le délit de pollution volontaire est sanctionné par les dispositions des articles L218-10 et suivants du code de l’environnement. S’il s’agit d’un navire-citerne (pétrolier) dont la jauge brute est supérieure ou égale à 150 tonneaux, ou bien supérieure ou égale à 400 tonneaux dans le cas des autres navires ou d’une plate-forme, les peines encourues sont de 10 ans d’emprisonnement et 15 millions d’euros d’amende (art. L.218-13). Les mêmes peines sont prévues pour les navires-citernes inférieurs à 150 tonneaux et les autres navires inférieurs à 400 tonneaux mais d’une puissance supérieure à 150 kilowatts (art. L.218-12). Pour les pollutions volontaires par hydrocarbures provenant des navires autres que ceux précédemment cités, l’article L.218-11  prévoit  50000 euros d’amende. En cas de récidive, ces peines peuvent aller jusqu’à 1 an d’emprisonnement et 100000 euros d’amende.

Le délit de pollution accidentelle en eau douce est prévu par les articles L.216-6 et L.432-2 du code de l’environnement. Il est complété par une interprétation extensive de la cour de cassation dans son arrêt du 16 avril 2019 (Cass. Crim, n°18-84.073)

L’article L.432-2 du Code de l’environnement réprime la pollution de l’eau qui porte atteinte au poisson et l’article L.216-6 du même code celle qui porte atteinte au milieu aquatique à l’exclusion du poisson. Dans l’arrêt du 16 avril 2019, la chambre criminelle de la Cour de cassation énonce que le champ d’application de ces deux infractions étant distinct, le cumul des poursuites ne méconnaît pas le principe non bis in idem.

L’article L. 216-6 sanctionne la pollution aquatique à l’exclusion du poisson. Cela concerne le fait de jeter, déverser ou laisser s’écouler dans les eaux superficielles, souterraines ou les eaux de la mer dans la limite des eaux territoriales, directement ou indirectement, une ou des substances quelconques dont l’action ou les réactions entraînent, même provisoirement, des effets nuisibles sur la santé ou des dommages à la flore ou à la faune.  Ces dispositions s’appliquent également aux déchets abandonnés ou jetés volontairement dans l’environnement.

L’article L. 432-2 concerne la pollution de l’eau qui porte atteinte au poisson. Il réprime le fait de jeter, déverser ou laisser écouler dans les cours d’eau, ruisseaux, canaux et plans d’eau, directement ou indirectement, des substances quelconques dont l’action ou les réactions ont détruit le poisson ou nui à sa nutrition, à sa reproduction ou à sa valeur alimentaire.

3.2.2. Les dispositions de prévention et de lutte contre les pollutions accidentelles

La loi sur l’eau et les milieux aquatiques du 30 décembre 2006 régit pour une grande partie la prévention de la pollution chronique des eaux, quel que soit le type d’eau (salée, saumâtre, douce).

Cette loi est la transposition en droit français de la directive européenne n°2000/60/CE du 23 octobre 2000, dite directive-cadre sur l’eau (DCE). Les principales dispositions de cette loi sont déclinées dans les codes suivants :

Les pollutions accidentelles des eaux et les dispositifs de gestion des incidents sont traités suivant le milieu par des instructions du premier ministre et le code de la sécurité intérieure. En mer, les opérations de lutte sont établies selon les instructions du premier ministre du 4 mars 2002 (documentation nationale POLMAR – en cours de refonte) et du 11 janvier 2006 (adaptation de la réglementation relative à la lutte contre la pollution du milieu marin). Les dispositions à prendre sont complétées par l’instruction du premier ministre du 28 mai 2009 et le code de la sécurité intérieure,  notamment ses articles L.741-1 et 741-4 relatifs à l’organisation de la réponse de sécurité civile (ORSEC), que ce soit pour les eaux relevant de la compétence des préfets de départements, pour celles de la compétences des préfets maritimes et des délégués du gouvernement pour l’action de l’Etat en mer pour les départements d’outre-mer (ORSEC maritime).

Des exercices réguliers sont conduits par les départements littoraux et les préfectures maritimes afin de coordonner la réponse de sécurité civile au niveau de l’interface mer-terre. Ils associent les autorités terrestres et/ou maritimes au titre de leur fonction de Directeur des Opérations de Secours (DOS), les intervenants sur site (SDIS, collectivités territoriales) et les experts en intervention et en environnement, tels l’Office Français de la Biodiversité (OFB), le Pôle National d’Expertise Polmar (PNE : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000042255892) et le Centre de Documentation, de Recherche et d’Expérimentations sur les pollutions accidentelles des eaux (Cedre).

Cet organisme dispose d’un agrément des ministères de la Transition écologique et de la Mer pour assurer des missions d’intérêt général d’expertise et d’appui aux autorités dans leurs missions de lutte contre les pollutions accidentelles. Il intègre par ailleurs le mécanisme ORSEC dans le cadre de son agrément du ministère de l’Intérieur pour les actions relatives aux pollutions aquatiques. A ce titre, le Cedre active en permanence un service d’aide à la décision 24h/24 par le biais d’une ligne téléphonique d’urgence (02.98.33.10.10) et d’une adresse mail (intervention@cedre.fr). Suivant l’ampleur de la pollution, le Cedre est en mesure de dépêcher ses équipes sur place afin d’apporter son support au DOS. Enfin, le Cedre  dispose d’une large gamme d’outils analytiques permettant d’apporter les conseils les plus opportuns pour rendre la lutte contre la pollution efficace tout en prenant en compte la préservation de l’environnement.

Au niveau des dispositions locales, les élus pourront s’approprier le contenu des deux guides opérationnels édités par le Cedre visant à déterminer les premières mesures à prendre en cas de pollutions accidentelle des eaux et gérer l’afflux de bénévoles en cas de pollution du littoral.

4  Les moyens de lutte

Les moyens déployés pour lutter contre une pollution accidentelle dépendent en grande partie du type de polluant impliqué et d’une reconnaissance exhaustive du site pollué. Il importe dès lors de procéder à son identification le plus rapidement afin de prévoir une réponse adaptée permettant une restauration de l’environnement dans les meilleurs délais. Le recours à un laboratoire spécialisé capable d’identifier et de caractériser le polluant devra être un des premiers réflexes du DOS. Le Cedre, dans le cadre de sa mission de service public, dispose des capacités permettant de le faire.

4.1  Le comportement des polluants

4.1.1. Les hydrocarbures

Dès lors qu’il est déversé dans l’environnement, un hydrocarbure va être soumis à différents processus modifiant son aspect. Ce vieillissement obligera à adapter les moyens de lutte utilisés.

De manière générale, le processus de vieillissement peut être reproduit schématiquement :

En eau douce, le comportement de l’hydrocarbure suivra le même processus de vieillissement, étant entendu que ce dernier sera influencé par la topographie, les bassins versants et l’hydrologie des lieux.

4.1.2. Les produits chimiques

Les produits chimiques ont des comportements différents en fonction de leurs composants. Pour les déterminer, il est fait appel à la classification Standard European Behavior Classification (SEBC) qui permet de classer les produits chimiques selon leurs comportements à court terme dans l’environnement. Cette classification connait cependant ses limites car elle est basée sur des études très souvent conduite avec une eau déminéralisée à une température ambiante de 20°C. Il est donc important de recourir à un organisme expert qui affinera le comportement du produit au regard des conditions réelles dans lesquelles ont eu lieu le déversement accidentel.

En cas de survenance d’un évènement, il est conseillé au DOS de sollicité le Cedre qui lui fournira les éléments de comportement précis.

4.2 Les dispositifs de lutte

Les moyens présentés ci-après sont génériques. Leur mise en œuvre nécessite au préalable de les faire valider par le Cedre afin de s’assurer qu’ils sont efficaces et qu’ils respectent l’environnement. Il est conseillé de se rapporter à la documentation opérationnelle du Cedre pour de plus amples informations.

4.2.1. La lutte contre les hydrocarbures

4.2.1.1. La dispersion

Cette méthode consiste à utiliser des tensio-actifs ou des solvants afin de mettre en suspension de l’hydrocarbure pour permettre sa dissémination dans l’environnement. Elle utilise des produits toxiques affectant la colonne d’eau et l’écosystème sur des profondeurs de 5 à 10 mètres. Sa mise en œuvre nécessite une validation afin de s’assurer que l’analyse bénéfices/risques soit favorable à l’environnement. En mer, son utilisation est réglementée et nécessite de respecter certaines conditions de profondeurs et d’éloignement des côtes. Le recours à la dispersion ne peut s’envisager que dans les premières heures du déversement, avant que le processus de vieillissement ne s’engage. En eaux intérieures, elle est déconseillée, sauf conditions très particulières

Des renseignements complémentaires peuvent être consultés dans le guide opérationnel du Cedre sur les dispersants.

4.2.1.2. Le confinement et la récupération

Que ce soit en eau douce ou salée, le confinement permet d’épaissir la nappe de polluant pour mieux la récupérer. Il peut aussi être utile pour dévier la nappe, limiter son étalement ou protéger un site sensible. En mer, dans la plupart des cas, le confinement est associé à un système de récupération de l’hydrocarbure.

Le dispositif suppose un hydrocarbure persistant non évaporant et une météo calme ou un plan d’eau abrité. La mise en œuvre de la technique nécessite le recours à un barrage dimensionné aux conditions météorologiques et environnementales, un récupérateur adapté à la viscosité du pétrole vieilli, une pompe dont le débit correspond à la quantité et au type de pétrole récupéré et des systèmes de stockage et de décantation permettant de séparer eau et hydrocarbure et d’optimiser les volumes récupérés.

Opération de confinement dynamique
Opération de confinement dynamique, pollution du Prestige, 2002. © Cedre

 

En eau douce, des barrages « à façon » sont parfois utilisés quand l’utilisation d’un barrage manufacturé est impossible, notamment quand celui-ci est inefficace du fait de son tirant d’eau, du courant ou des substrats présents dans l’eau susceptibles de le perforer ou encore quand le comportement du polluant favorise son passage sous la jupe du barrage manufacturé. Dans pareils cas, le recours à un dispositif composé de matériaux peu onéreux et assemblé sur place permet de combattre efficacement la pollution.

4.2.1.3. L’absorption

Un absorbant est une matière oléophile et hydrophobe. Il est utilisé pour lutter contre des pollutions de faible ampleur sur les hydrocarbures et certains produits chimiques. Son utilisation la plus courante se fait au sein des zones portuaires, en milieu littoral calme, dans les eaux intérieures, les lacs et les cours d’eau.

L’absorbant s’emploie dans le cadre de la protection d’une zone, un confinement associé à un barrage, la récupération et la filtration des polluants. Enfin, il participe au nettoyage des personnels et matériels utilisés pour lutter contre la pollution.

4.2.2. La lutte contre les produits chimiques

Les pollutions par produits chimiques sont complexes à appréhender du fait de la très grande variété des substances, de leurs propriétés, de leur dangerosité, des conditions propres à l’accident et des volumes impliqués. Il convient par ailleurs de prendre en compte les paramètres environnementaux de lu déversement et la sensibilité des sites touchés.

Il n’y a donc pas de réponse générique à un tel déversement. De l’évaluation de la situation (recueil des informations, suivi de la pollution, évaluation des risques) dépendra la réponse apportée.

Dans ce domaine, l’éventail des choix est large. Sans être spécifiquement abordé ici, on peut citer :

  • L’obturation et le colmatage ;
  • L’utilisation des barrages ;
  • La récupération dans la colonne d’eau ;
  • Le confinement et la récupération sur le fond ;
  • La mise en place de rideaux d’eau pour protéger une zone de vapeurs toxiques ;
  • Le pompage ;
  • L’absorption ;
  • La neutralisation acido-basique visant à ramener le pH près de la neutralité, cette méthode n’étant toutefois pas envisageable hors de plans d’eau fermés de volume limité.

Ces différentes techniques ainsi que le processus d’aide à la décision à destination du DOS font l’objet du guide opérationnel du Cedre sur les pollutions accidentelles des eaux par des substance nocives potentiellement dangereuses.

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