R12 – Immeubles menaçant ruine

péril immeuble

Mise à jour : avril 2021

Jean-Yves DELECHENEAU, missions assurances et représentation de la mutuelle SMACL assurance

Deborah MAYAUD – architecte des risques majeurs, doctorante en architecture et urbanisme

 

Sommaire :

 

Lorsque l’état d’un immeuble constitue un risque d’atteinte à la sécurité publique,  le maire dispose de deux types de pouvoir de police, portés tous deux par des procédures distinctes.

Lorsque la cause de danger est liée à la dégradation intrinsèque de l’immeuble, le maire s’appuie sur les procédures de mise en sécurité (d’urgence et ordinaire), en application du livre V du Code de la construction et de l’habitation (CCH).

Dans le cas d’avènement d’une catastrophe ou d’un accident ayant impacté un immeuble, le maire s’appuie sur la procédure d’urgence en application des articles L.2212-2 à 4 du Code général des collectivités territoriales (CGCT).

A noter : dans le cas où le maire négligerait de prescrire les mesures nécessaires à assurer la sauvegarde de la sécurité publique, la Préfet peut se substituer à lui sur le fondement de l’article L.2215-1 du Code général des collectivités territoriales (CGCT).

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1 – Causes du péril intrinsèques à l’immeuble

Lorsqu’un immeuble présente un danger au vu de sa solidité (risque d’effondrement d’un escalier, garde-corps, balcon, toiture, façade, plancher, chute de pierres…), le maire peut engager une procédure de péril à l’encontre du propriétaire d’un logement ou du syndic de copropriété lorsque l’immeuble est en copropriété. L’objet de cette législation n’est pas d’obliger à entreprendre des travaux de réparation ou de restauration complètes du bâtiment mais des travaux strictement nécessaires pour mettre fin au péril.

  • La procédure de péril, dite de mise en sécurité, est mise en œuvre quand un danger réel est à redouter pour la sécurité publique ou pour la sécurité des occupants.
  • Le danger peut concerner la voie publique ou les abords extérieurs d’un édifice (danger pour les passants) mais également les propriétés privées (danger pour les occupants ou les utilisateurs d’un bâtiment).
  • Le danger doit émaner de l’édifice lui-même : la menace de ruine provient le plus souvent de la vétusté, du défaut d’entretien ou de vices de construction, c’est-à-dire de causes inhérentes à la construction.

La procédure de mise en sécurité peut être :

  • ordinaire – L’arrêté de péril est ordinaire lorsque la sécurité des occupants n’est pas immédiatement mise en jeu
  • d’urgence – L’arrêté de péril est grave et imminent si la sécurité des occupants est immédiatement mise en jeu (sécurisation préalable à tout autre type de travaux nécessaire).

Le maire intervient au titre de son pouvoir de police spéciale prévue par l’article L. 2213-24 du Code général des collectivités territoriales dans les conditions des articles L. 511-1 à L. 511-6 du Code de la construction et de l’habitation.

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2 – Causes du péril extérieures à l’immeuble

En revanche, lorsque la ruine est causée par un événement naturel extérieur (éboulement, affaissement de sol, inondation, incendie) ayant son origine dans des causes étrangères à la construction, le maire intervient au titre de son pouvoir de police générale prévu par l’article L. 2212-2 à 4 du CGCT dont le domaine d’application couvre, notamment, les cas de catastrophe naturelle ou d’accident du à des éléments ne pouvant engager la responsabilité des propriétaires.

Dans ces conditions, et même si la solidité d’un immeuble est compromise et menace la sécurité publique, la procédure du péril en application des articles L. 511-1 et suivants du Code de la construction et de l’habitation est inapplicable.

Il en va ainsi en cas de séisme (CE, 5 janvier 1979, ville de Lyon). , quels qu’en soient les propriétaires (CAA Lyon : 21 mai 1991, ville de Lyon).

Fondée sur l’intérêt général, les actions entreprises par la collectivité publiques (démolition, sécurisation,…) resteront à sa charge.

A contrario, si l’effondrement du terrain d’une construction est dû à la circonstance que la conception et l’exécution de la construction étaient inadaptées à ce terrain, le maire a pu légalement ordonner l’évacuation de l’immeuble sur le fondement de l’article L. 511-3 du Code de la construction et de l’habitation (péril imminent) (CE : 24 mars 1989, époux Junino).

N’ont pas le caractère d’accidents naturels : le heurt par un poids lourd de la corniche d’un balcon surplombant la voie publique (CE : 11 mars 1983, Mme Lacroix et autres) ou le scellement de consoles par EDF ou les Postes et Télécommunications ; dans de tels cas, la procédure de péril est applicable, quitte pour le propriétaire concerné à se retourner contre l’auteur des dommages pour se faire rembourser les frais qu’il aura dû exposer pour faire cesser le péril. L’exécution de travaux publics est une cause extérieure qui n’a pas le caractère d’accident naturel (CE : 3 mars 1976, ville de Nogent-le-Roi).

Dans le cadre de l’exercice de son pouvoir de police générale sur le fondement de l’article L. 2212-2 du CGCT, le maire peut interdire l’accès de l’immeuble dont l’état peut mettre en péril la sécurité des occupants (CAA Nantes, 7 juin 2001). Il lui appartient donc de prendre des arrêtés de police dont la violation sera sanctionnée selon les règles du droit commun.

A noter : l’arrêté d’urgence pris sur le fondement des articles L.2212-2 à 4 doivent exposer clairement des conditions de nature à le suspendre. Contrairement aux procédures liées au pouvoir de police générale du maire, il n’existe pas de procédure de mainlevée.

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3 – Causes du péril à la fois internes et externes

Si le délabrement de l’immeuble est causé à la fois par des causes extérieures et des causes internes, la procédure de péril peut être mise en œuvre (CE, 24 mars 1989, préfet de police).

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Pour en savoir plus :

Légifrance, Code de la construction et de l’habitation (2021)
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/texte_lc/LEGITEXT000006074096?init=true&page=1&query=cch&searchField=ALL&tab_selection=all

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Livre 5 – Lutter contre l’habitat indigne https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006074096/LEGISCTA000006128692/#LEGISCTA000042342704

 

Code général des collectivités territoriales, partie législative, deuxième partie, livre II, titre 1er, chapitre II : Police municipale
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https://www.legifrance.gouv.fr/codes/section_lc/LEGITEXT000006070633/LEGISCTA000006164555/#LEGISCTA000006164555

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République Française, Service-public.fr (2022). Habitat menaçant ruine (en péril). URL : https://www.service-public.fr/particuliers/vosdroits/F16104